22 mai 2015

The China Experience - 10/ The Ulan-Bator Experience (Pt. 3)

Premier voyage en Chine, septembre-novembre 2002.

Décollage ici.
Expérience précédente : The Short SteppeXperience.


29 septembre 2002 – 02 octobre 2002 : The Ulan-Bator Experience (Pt. 3), Oulan-Bator (Mongolie).

Je prends de nouveau quelques jours pour me reposer et me réchauffer dans la confortable guesthouse. Très vite, je m'aperçois que mon adresse email est inaccessible : le site de mon fournisseur (thedawn.com) est aux abonnés absents. Je décide d'attendre quelques jours et de voir si ça remarche. Je conçois aussi quelques idées pour de futurs projets. J'ai envie de mettre une photo de Mao Zedong en Mickey Mouse en couverture d’un futur numéro de Mercure Liquide (comme il faudra encore deux ans pour que ne sorte le premier numéro, cette idée me sera passée). Comme Pulsize a renoncé à faire de Small City un film, je caresse l'idée d'en faire mon second roman pour aller au bout de la thématique de la vie nocturne abordée dans L’incident Œdipe (inédit). Pascal, le Suisse, m'arrache à ces méditations afin de me présenter Mark l’Anglais. Tous deux insistent pour que je les suive en boite de nuit ! Après trois verres de vodka, je cède et me voilà à l’UB Palace, le plus gros club de la ville (donc du pays). La clientèle a pour l’essentiel moins de vingt ans et se régale de mauvaise techno et de mauvais hip-hop. De temps à autre, un « show » de quelques minutes interrompt le mix et captive le public : deux hommes à demi nus qui s’effleurent en dansant un slow, un concours de celui qui boira le plus vite un litre de bière cul-sec, des danseuses seins-nus qui gesticulent grossièrement, une loterie dont les tickets sont nos billets d’entrée, un animateur qui chante Happy Birthday à ceux dont c’est l’anniversaire… Bref, nous touchons les bas-fonds de la ringardise et je noie mon désespoir dans la vodka. Pascal est décidé à séduire une jeune fille du cru et, comme je n'ai pas l'intention de le suivre sur ce terrain-là, je continue de boire jusqu’à m’en rendre malade. Je file aux toilettes et vomis tout ce que j’ai à vomir lorsque, à peine remis, je tourne la tête et me retrouve face à Madame Pipi, une petite vieille furieuse qui fait irruption dans la cabine et me hurle dessus en Mongol avant de me fourrer une éponge dans les mains. Derrière elle, un vigile observe la scène d'un air sévère alors, tout à fait effaré, j’éponge vaguement la cuvette et m'éclipse discrètement. Je m’écroule ensuite sur une table et comate longuement au son d'une techno épouvantable. Je ne sais combien de temps je reste ainsi avachi mais à quatre heures du matin la boite ferme, et il faut partir. Je tiens à peine debout et m'empresse de vomir tout ce qui me reste dans les tripes sur le dancefloor. Vomir est décidément quelque chose de très mal vu en Mongolie car à présent, ce sont les videurs qui me crient dessus. Leur chef m’intime de payer une « amende » de trois-mille tögrögs (environ trois euros) et je suis prêt à leur donner tous les tögrögs qu’on voudra pourvu qu'on me laisse en paix, sauf qu’un Australien aussi ivre que moi s'insurge que c’est du vol et que je ne dois pas payer, et puis voilà qu’un flic arrive et demande ce qui se passe, alors je m'empresse d'éconduire l’Australien et de régler ma prune, après quoi nous nous enfournons dans un taxi avec Pascal et Mark. Pascal est aussi ivre que moi mais lui a une pèche d’enfer, et il décrète arbitrairement que nous devons aller manger des oushours (des beignets au... mouton bouilli !). Dix minutes plus tard, nous nous retrouvons hilares, en train de nous empiffrer dans un snack nocturne pendant que vingt-deux jeunes Mongols (j’ai compté) jouent à un doomlike en réseau dans l’arrière salle. Je retrouve mon entrain et nous rendons les serveuses un peu folles parce que nous re-commandons des oushours toutes les cinq minutes et ne cessons de faire des blagues qu'elles ne comprennent pas. Mark, qui veut aller se coucher, nous attend dans le taxi et vient demander toutes les dix minutes si on-peut-y-aller-maintenant et à chaque fois on lui répond que non-pas-encore-viens-donc-te-joindre-à-nous-on-s’amuse-bien, et Mark nous rappelle que le-taxi-attend-depuis-tout-à-l'heure et nous clôturons le débat en expliquant que le-compteur-tourne-et-il sera-payé-pour-l'attente et Mark repart en grommelant, et au bout d’une heure de ce manège nous finissons par nous décider à regagner la guesthouse mais Mark est furieux.

Pascal doit regagner la Suisse dans quelques jours mais il est tombé fou amoureux de la Mongolie, où il retournera bientôt (entre temps, il honorera un rendez-vous galant avec une Mongole rencontrée à l'UB Palace, qui ne lui accordera au bout du compte que quelques bisous). C'est avec plaisir que d'un mail à l'autre, nous suivons depuis nos pérégrinations respectives à travers le monde.

Je passe les deux jours suivants à coocooner dans l’appartement. Il fait désormais si froid que je ne sors que pour manger du mouton bouilli et visiter le musée d’histoire naturelle de la ville. Ce dernier ne présente guère d'intérêt, sinon un squelette intégral de tyrannosaure. Hormis cela, on y trouve diverses bestioles empaillées et tout à l'allure d'un musée du dix-neuvième siècle laissé à l'abandon. Je retrouve Monica la Suisse, qui est toujours là, et je passe beaucoup de temps à discuter avec des gens du monde entier. C’est aussi à ce moment-là que j’écris le texte Vacances (inédit), un rap pour mon groupe Shoona Sassi qui relate mes galères de voyage, d'Istambul à la Mongolie en passant par la Long Way Home Experience. Je persiste aussi à faire des rêves bizarres à propos de ma famille. Il en est un où l’on exhume le cercueil de mon grand-père décédé en 1979 pour s'apercevoir que, vingt-trois ans après sa mort, il respire encore, comme une sorte de vampire. Je songe également à la suite de mon voyage. Que faire à présent ? Je dois toujours aller à la rencontre des Miaos et des Dongs. Mais avant de me lancer dans l’exploration de villages isolés et difficiles d'accès, je m'offrirais bien une semaine dans un coin touristique et paisible au Sud de la Chine, histoire de me poser un peu et de reprendre le soleil. L’air de rien, cela fait un mois que je cours dans tous les sens, que je m’épuise dans des villes dont on ne parvient pas à sortir, dans des jeeps surchargées de Mongols, dans des steppes glaciales… Et puis avec tout ce mouvement, je n’ai pas pu travailler sérieusement à mes projets littéraires, aussi est-il impératif que je m’arrête un peu quelque part, ne fut-ce que pour ça. J’ai besoin d’une petite pause, d’une semaine de détente et d’écriture. Je me décide pour le Xishuangbhanna, la région tropicale qui se trouve tout au Sud de la Chine. J’ai presque un continent à traverser pour y parvenir. Je dis au revoir à mes amis, déjeune une dernière fois avec Monica et m’engouffre dans un train pour la Chine en compagnie de Brit l’Allemande et Stéphane le Français. Ils forment un couple sympathique mais plutôt réservé, de sorte qu’on ne parle pas des masses. La montée dans le wagon est une cohue épouvantable et un pickpocket parvient à me dérober tout l’argent liquide qui me reste (vingt-cinq euros).


Prochaine expérience : The Long Way South Experience.

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